La France est le plus beau pays du monde et ses montagnes en sont le joyau 🇫🇷💎.
✈️Nous décollons de Chambéry et prenons un peu de hauteur pour approcher cette majestueuse montagne.
A la frontière franco-italienne, le Mont-Blanc est le plus haut sommet d’Europe occidentale, culminant à 4809 mètres. Mais est-il français ou italien ?
L’actuelle frontière entre la France et l’Italie au niveau du massif du Mont-Blanc fut établie en application du traité de Turin en 1860. Cependant, trois endroits du massif demeurent contestés, notamment les versants piémontais du col du Géant, du mont blanc de Courmayeur et du dôme du Goûter.
Le point le plus emblématique et le plus discuté est évidemment le sommet du Mont-Blanc lui-même. Point culminant des Alpes, il est placé entièrement en France sur les cartes françaises alors que les cartes italiennes le représentent sur la frontière entre les deux pays.
Retour sur l’histoire de ce mont au cœur des Alpes.
Temps de lecture : 10 minutes.
Qui a fait la première ascension ?
L’histoire du Mont Blanc est jalonnée de nombreuses aventures, dont la plus notable est sans doute sa première ascension réussie.
Le défi lancé par un géologue suisse
Tout commence au XVIIIe siècle sous l’impulsion de Horace Bénédict de Saussure, géologue suisse né à Genève en 1740, qui se donne comme mission de convaincre la communauté scientifique des mystères cachés du Mont Blanc.
Mais comment atteindre un tel sommet, considéré alors comme inaccessible ? Horace-Bénédict de Saussure a une idée ingénieuse : en 1760, il promet une récompense substantielle à quiconque pourrait trouver une voie sûre vers le sommet du Mont Blanc et l’y guider. Ce geste déclenche une véritable course vers le sommet, motivant de nombreux alpinistes et guides locaux à relever le défi.
Ses intérêts se concentrent sur la géologie, la météorologie, la botanique et l’étude des glaciers. Atteindre le sommet lui offrirait non seulement une vue panoramique imprenable mais aussi la possibilité de mener des expériences scientifiques inédites à une altitude jamais atteinte auparavant.
Cette initiative conduit à plusieurs tentatives infructueuses avant que, en août 1786, deux alpinistes relèvent le défi.
Deux alpinistes français entrent en scène
En août 1786, deux aventuriers originaires de Chamonix, Michel-Gabriel Paccard et Jacques Balmat, réussissent l’exploit de marcher jusqu’au sommet du Mont Blanc, gravant ainsi leurs noms dans les annales de l’alpinisme.
Ils partent le 7 août au soir, bivouaquent dans la montagne, pour finalement arriver au sommet le 8 au matin.
Des siècles de tensions cartographiques
Avant les guerres révolutionnaires : le Mont-Blanc appartient aux Etats de Savoie
Avant les guerres révolutionnaires, la souveraineté du Mont-Blanc est indiscutée : le duché de Savoie et la vallée d’Aoste sont unifiés sous la bannière des États de Savoie.
Par conséquent, aucune délimitation nationale ne scinde le massif durant cette période.
Durant la Révolution et l’Empire : la Savoie devient française
Le 27 Novembre 1792, les forces françaises annexent la Savoie.
Vaincu par les troupes de Napoléon Bonaparte à plusieurs reprises, le roi de Sardaigne reconnaît les annexions et cède la Savoie (et Nice) à la France par le traité de Paris du 15 Mai 1796. C’est la première fois qu’une frontière internationale traverse le massif.
Pour bien comprendre le contexte historique et politique en France à la fin du XVIIIe et XIXe siècle (Révolution, ascension de Napoléon, Premier Empire etc.), je vous invite à consulter la frise chronologique dans le paragraphe suivant.
Contexte historique du XVIIIe et XIXe siècle en France
La frise chronologique qui vous aidera à mieux appréhender le contexte historique et politique en France au XVIIIe et XIXe siècle.
Cette frise constitue une parenthèse dans cet article, pour mieux comprendre cette période complexe de l’Histoire de la France et de l’Europe.
Pour aller plus loin dans la découverte de cette période, je vous invite à consulter l’article suivant : Comment Napoléon Bonaparte est-il devenu Empereur des Français ?
Aussi, vous avez accès à mes 13 frises chronologiques – de la Gaule romain à la proclamation de la IVe République – sur cette page.
Parenthèse fermée, revenons-en à la frontière du Mont-Blanc !
De 1814 à 1860 : la Savoie de nouveau sous contrôle de la Sardaigne
Abdication et exil de Napoléon
En 1814, les armées coalisées (Prusse, Autriche, Russie, Angleterre) envahissent la France et marchent sur Paris. Le 6 avril 1814, Napoléon abdique pour la première fois en faveur de son fils. Cependant, les Alliés ne sont pas d’accord et, par le Traité de Fontainebleau (11 Avril 1814), Napoléon est exilé à l’île d’Elbe.
Le traité de Paris redessine les frontière de la Savoie
Le traité de Paris du 30 mai 1814 restitue au royaume de Sardaigne la partie orientale de la Savoie — les États de Savoie retournent à leurs frontières originelles d’avant les guerres napoléoniennes
1860 : la Savoie redevient française
En 1860, le destin de la Savoie bascule en faveur de la France.
Dans le processus de réalisation de l’unité italienne, Victor-Emmanuel II de Savoie bénéficie du soutien militaire et diplomatique français. En échange, la France exige les territoires sardes de Savoie et de Nice. Ainsi, le 24 mars 1860, via le Traité de Turin, ces régions sont intégrées à la France.
1865 : la carte topographique du capitaine Mieulet
En 1865, le capitaine Jean-Joseph Mieulet, cartographe militaire, est missionné pour élaborer la carte d’état-major de la zone du Mont-Blanc.
C’est cette carte qui, pour la première fois, propose un tracé frontalier alternatif qui englobe les glaciers au sommet du mont Blanc sur le territoire français.
Selon cette interprétation cartographique, le pic serait intégralement en France.
Ce tracé est repris par les éditions ultérieures de la carte d’état-major, puis par les cartes de l’Institut géographique national lorsque cette entité civile succède à l’armée en matière de cartographie.
Les cartes italiennes n’ont pas la même interprétation
L’Atlas sarde de 1869 (basé sur des levés réalisés avant le traité de Turin), persiste à montrer la frontière suivant la ligne de crête, en cohérence avec la séparation administrative historique entre la Savoie et la Vallée d’Aoste.
Parallèlement à l’édition de la carte française du Capitaine Mieulet, les documents produits par les autorités italiennes présentent une interprétation géographique différente.
Le mont Blanc sur les cartes contemporaines : les points de vue français et italien
La tentative de consensus d’après la Seconde Guerre mondiale
Après la Seconde Guerre mondiale, la question de la frontière est abordée dans le traité de Paris de 1947. Ce traité précise que la démarcation entre la France et l’Italie s’établit au sommet du Mont Blanc.
Cependant, français et italiens campent sur leur point de vue respectif.
Le point de vue français
Depuis sa première identification au milieu du XVIIIe siècle, le mont Blanc a toujours été, selon les représentations françaises, situé sur le territoire de Chamonix. Cette perception fut inscrite dans le traité de Paris lors de l’annexion de la Savoie en 1796.
Bien que ce texte ait été abrogé en 1815 avec la fin de l’Empire français, il représente la première attribution administrative du mont Blanc.
Sur les cartes éditées en France par l’IGN, le tracé de la frontière est le même que celui de la carte du capitaine Mieulet de 1865 : le sommet du mont Blanc y apparaît comme entièrement français, tandis que le mont Blanc de Courmayeur y figure comme sommet frontalier.
Le point de vue italien
Selon l’Italie, le traité de Paris de 1796 ayant été annulé, c’est au traité d’Utrecht de 1713 qu’il convient de se référer pour définir les frontières. Ce dernier détermine la délimitation entre le Dauphiné, partie du royaume de France, et le Piémont, sous le contrôle de la Maison de Savoie.
Sur les cartes italiennes, qu’il s’agisse de celles de l’Institut géographique militaire (IGM) ou d’éditeurs privés comme l’Istituto Geografico De Agostini ou le Touring Club Italiano, le tracé respecte scrupuleusement la ligne de partage des eaux, à l’instar de l’Atlas sarde de 1969.
Ainsi, le sommet du Mont Blanc est représenté comme étant à cheval entre les deux nations, avec le Mont Blanc de Courmayeur entièrement situé en territoire italien.
Mais qu’en pensent les autres pays européens ?
Les cartes suisses
Les cartes produites par l’Office fédéral de topographie suisse ont longtemps (de 1963 à 2018) adopté la « version française » du tracé.
A partir de 2018, ces cartes indiquent désormais le sommet comme étant un « territoire au statut contesté ».
Les cartes allemandes et autrichiennes
Les cartes allemandes et autrichiennes suivent la “version italienne du tracé” : le sommet du Mont-Blanc est à la frontière franco-italienne, et le mont Blanc de Courmayeur est entièrement italien.
Les cartes anglaises
Les cartes anglaises suivent la version française : le mont Blanc est français et le mon Blanc Courmayeur se situe à la frontière franco-italienne.
Quid des cartes numériques ?
Apple Plans
Le sommet du Mont-Blanc est situé exactement à la frontière franco-italienne.
Google Maps
Indique les deux interprétations de la frontière
Google Earth
Indique les deux interprétations de la frontière
Conclusion
La question de l’appartenance du Mont Blanc est complexe, s’enracinant profondément dans l’histoire européenne et les tractations diplomatiques entre la France et l’Italie.
Si la France a toujours défendu avec conviction l’idée que le sommet se trouve intégralement sur son territoire, les documents historiques, les cartes italiennes et même suisses montrent une vision parfois divergente.
Bien que la position française jouisse d’un relatif consensus international, l’appartenance exacte du Mont Blanc demeure un sujet de débat. En effet, le sommet du Mont-Blanc représente bien plus qu’une simple élévation géographique. Il fut le témoin des évolutions politiques et territoriales des nations italiennes et françaises au fil des siècles.
Quiz
Quiz – Mont Blanc : le toit de l’Europe est-il Français ou Italien ?
15 questions pour tester vos connaissances sur l'Histoire du Mont Blanc !